Dressée au coeur de Paris depuis le XIIe siècle, la cathédrale Notre-Dame a été bâtie par et pour la ville, dont elle a modifié le visage. Loin de n'être qu'une construction de pierre, dont les prouesses architecturales et esthétiques ne cessent de fasciner, Notre-Dame constitue avant tout un phénomène historique urbain et global inscrit dans la longue durée, dès avant la cathédrale gothique. C'est de ce constat que sont partis Boris Bove et Claude Gauvard, accompagnés d'une quinzaine de spécialistes parmi les meilleurs, pour retracer l'histoire de cette cathédrale, laquelle, longtemps restée le symbole d'une ville, appartient désormais au patrimoine mondial, au point que la destruction de sa flèche lors du grand incendie de 2019 ait ému la communauté internationale.
Plus d'une centaine de documents iconographiques et une dizaine de cartes originales éclairent cet objet d'étude, au croisement de l'histoire religieuse, sociale, politique, culturelle et urbaine.
« Cela fait plus de vingt ans que je me consacre à l'étude de Staline et des mécanismes qui ont sous-tendu son action. Une action qui aboutit à la destruction de millions de vies humaines. Malgré le caractère éprouvant, sur le plan émotionnel, de ce travail, je m'y suis tenu avec constance », écrit Oleg Khlevniuk en introduction à cette nouvelle biographie saluée par la critique internationale. Unanimement reconnu comme le plus éminent spécialiste russe du stalinisme, fort d'une connaissance exceptionnelle des grands fonds d'archives soviétiques, l'auteur suit la vie et le parcours de ce dictateur hors catégories. Il pose un regard neuf sur le « système de règles » de Staline, les mécanismes politiques de son ascension, les ressorts d'un mode de gouvernance fondé sur un interventionnisme de tous les instants et un travail quotidien titanesque.
Cette biographie brillante et captivante a reçu le prestigieux Prose Award 2016 décerné par de grandes universités américaines.
L'histoire de Françoise d'Aubigné, épouse Scarron puis marquise de Maintenon, évoque ces contes de fées où les bergères épousent des rois. Elle constitue sans doute l'exception la plus spectaculaire à la règle des barrières sociales de l'Ancien Régime. Entrée dans l'histoire par la porte de service, Françoise y accomplit l'une des plus fabuleuses aventures du XVIIe siècle. Son éducation, son premier mariage, son veuvage, sa rencontre avec Mme de Montespan, ses premiers contacts avec la cour, sa mission auprès des bâtards royaux, l'affaire des Poisons ont été autant d'étapes sur le long chemin, que rien ne laissait prévoir, de l'incroyable ascension qui devait la rapprocher de Louis XIV, au point qu'elle finit par épouser le plus grand roi de l'époque, au faîte de sa puissance et à l'apogée de son règne.
L'histoire de Madame de Maintenon s'envisage ici moins comme le portrait d'un caractère, d'une personnalité, d'un destin, que comme l'étude et l'exploration de l'époque à laquelle il a appartenu, de la société qu'il a fréquentée, des liens qu'il y a noués. La prodigieuse ascension de cette personnalité d'exception s'explore par l'analyse de son réseau de relations sociales, soigneusement constitué pendant son premier mariage et son veuvage, mais aussi le fonctionnement de la Cour : un nouveau système prêt à admettre ce type de profil social, qui évoque certains grands serviteurs de l'État.
Acquapendente, janvier 1633. Galilée, convoqué par le Saint-Office pour « avoir tenu et cru la doctrine fausse et contraire aux Saintes Écritures que le Soleil est le centre du monde », se retrouve en quarantaine à cause d'une épidémie de peste. À Rome, son Dialogue sur les deux grands systèmes du monde a causé le scandale et provoqué l'ire de son protecteur Urbain VIII. Le savant toscan, malade et à moitié aveugle, va devoir répondre de ses écrits...
Il met ce temps à profit pour repenser à sa vie, fantasmer le futur, tout en craignant de ne jamais revenir des mains de l'Inquisition. S'adressant directement au lecteur, il cherche à justifier sa version des faits avant d'être englouti à jamais par l'histoire... livrant ainsi un témoignage intime sur sa vie étonnante, ses découvertes, ses succès, ses combats, et la vie tumultueuse de son époque.
Dans ces vrais-faux Mémoires, tour de force littéraire mêlant véracité historique et imaginaire, Daniele Vegro livre un portrait haut en couleur d'un Galilée plus vrai que nature, partageant sans retenue doutes, passions, émois et colères. Et nous révèle, derrière le savant de génie dont les découvertes en astronomie et en physique vont bouleverser le monde, l'homme, truculent, passionné, irrévérencieux... et impitoyable démolisseur de dogmes.
Depuis 500 ans, la renommée de Catherine de Médicis est livrée aux jugements les plus opposés. Dénoncée par les uns, exaltée par les autres, son nom est entaché de la violence des massacres de la Saint-Barthélemy. Sa réputation masque pourtant une personnalité complexe. Femme de réflexion et d'action, d'une indomptable énergie, soucieuse de préserver la grandeur de la monarchie, elle s'est engagée dans une politique intraitable en intervenant sans relâche auprès de ses fils, au nom desquels elle a régné pendant près de trente ans.
Catherine de Médicis était certainement une diplomate de génie. En digne petite-fille de Laurent le Magnifique elle se manifesta aussi très tôt mécène, la bâtisseuse, collectionneuse d'objets d'art rares et précieux, s'entourant des plus grands artistes romains ou toscans.
Détesté par les uns, adulé par les autres, Jean-Paul Marat est le plus controversé et le plus méconnu des grands acteurs de la Révolution française. Médecin et penseur au temps des Lumières, il subit l'hostilité ou l'indifférence de Voltaire et de Condorcet. Journaliste engagé, Marat illustre l'explosion de la presse d'opinion, le quatrième pouvoir, à travers son quotidien, l'Ami du Peuple, au fil de 685 numéros souvent censurés et publiés dans la clandestinité. Élu à la Convention, accusé d'aspirer à la dictature, associé à Danton et Robespierre, il est acquitté triomphalement par le Tribunal révolutionnaire, avant d'être assassiné, le 13 juillet 1793, par Charlotte Corday.
Après sa mort, sublimée par le tableau de David, commence pour Marat une existence posthume, non moins agitée que la première. Héros d'un culte inouï rendu au "martyr de la Liberté" pendant la Terreur, il devient ensuite un anti-héros absolu, victime d'une "dépanthéonisation" spectaculaire. Dès lors, des mythes tenaces, des légendes inconciliables - dorée ou "maratiste", d'un côté, noire ou "anti-maratiste", de l'autre ; s'affrontent et brouillent notre compréhension du personnage.Recentrant les analyses sur les documents et les archives, donnant la parole au principal intéressé, Serge Bianchi se propose de réduire, voire d'abolir, le fossé creusé entre ces mémoires si contrastées et la biographie de celui qui se voulut "l'Ami du Peuple".
Femme engagée, socialiste, pacifiste, féministe et très active, Marguerite Thibert (1886-1982) a traversé une bonne part du XXe siècle. Docteure ès lettres en 1926, elle devient fonctionnaire au Bureau international du travail, en charge du travail des femmes et des enfants, puis experte envoyée en mission dans les pays émergents, avant d'être en France une figure centrale du Comité du travail féminin.
Françoise Thébaud, grande historienne des femmes, nous raconte un parcours exceptionnel dans un ouvrage fascinant à tous égards.
Née dans une famille de la bourgeoisie juive de Saint-Pétersbourg, Raïssa Bloch embrasse en 1917 les idéaux intellectuels et artistiques de la Révolution russe. Membre de la Maison des Arts de Petrograd, elle est brièvement emprisonnée par le régime bolchevique puis envoyée en mission scientifique en Allemagne. Á Berlin, elle rejoint l'Institut des Monumenta Germaniae historica et publie son premier recueil poétique. Avec le jeune Michel Gorlin, de onze ans son cadet, elle crée le Club des poètes russes auquel participent Vladimir Nabokov et Vladimir Korvin-Piotrovski. Mais la prise de pouvoir d'Hitler la pousse à un second exil, cette fois dans une France qui s'annonce accueillante - pour un temps au moins. Plus que jamais ensemble, Raïssa et Michel Gorlin s'intègrent rapidement à la vie scientifique et littéraire parisienne. Avec la guerre, puis l'arrestation de Michel, les rafles, Raïssa doit fuir encore, disparaître. Avant les camps, Raïssa connaîtra le deuil, mais aussi l'entraide des réseaux de la Résistance française. Plusieurs fois son destin a failli changer de route.
Le maréchal Alphonse Juin reste célèbre pour ses victoires en Tunisie en 1943, puis en Italie l'année suivante, à la tête du Corps expéditionnaire français. Mais ces faits d'armes masquent une carrière entièrement orientée vers la défense de l'Empire colonial français en Afrique du Nord : au Maroc avec Lyautey, sous Vichy ou comme résident général à Tunis puis Rabat, Juin est l'archétype de l'officier de l'armée d'Afrique. Son comportement vis-à-vis du pouvoir politique et son rapport à l'obéissance « d'homme à homme » avec Lyautey, Pétain ou de Gaulle, ont varié en fonction de ses engagements impériaux. Juin connaît au début des années 1950 l'apogée de son influence politico-militaire, avant d'être enfin marginalisé par le processus de décolonisation et par la politique algérienne du général de Gaulle.
Fondée sur des archives inédites, françaises, espagnoles et marocaines, cette biographie explore la brutale transformation qui a mené de l'Afrique du Nord française au Maghreb contemporain. Ce livre n'est ni une hagiographie, ni une analyse à charge, mais une tentative d'écriture d'une histoire partagée par les deux rives de la Méditerranée.
En mars 1660, Mexico, capitale de la Nouvelle-Espagne, est livrée aux mains du comte de Baños. Le nouveau vice-roi s'empare du pouvoir avec violence et avidité, plaçant ses proches et détournant les revenus de la colonie. En à peine quatre années, il plonge l'administration de la région dans un régime de corruption inédit. Le comte de Baños était-il un gouvernant plus âpre au gain que d'autres ? Un homme sous l'influence de son épouse ? Un vice-roi malhabile ? L'innocente victime des circonstances ?
Pierre Ragon démêle devant nous les fils d'une enquête qui met au jour les arcanes d'un gouvernement rapidement décrié. À travers cette histoire singulière, il définit les contours d'un système colonial où les marges lointaines doivent s'accommoder de l'absence du roi, en un temps où l'obéissance et la fidélité tiennent à sa présence. Éloignés du souverain, ses représentants sont les premiers à s'affranchir de l'autorité dont ils se prévalent. Et souvent, ils en abusent.
Cet ouvrage est tout à la fois le portrait d'un vice-roi avide de biens et de pouvoir, et l'exploration d'un gouvernement profondément corrompu. Pierre Ragon nous transporte au coeur d'un système politique fait de réseaux et de clientèles et nous donne à voir, à hauteur d'homme, les arcanes d'un monde colonial méconnu.
L'amiral Georges Thierry d'Argenlieu est entré dans l'histoire sous les traits du « carme naval ». Incarnation à l'eau salée de l'alliance du sabre et du goupillon, il aurait déclenché la guerre d'Indochine en torpillant les efforts du général Leclerc en faveur d'une solution négociée avec Hô Chi Minh. Pourtant, la vie de ce très proche du général de Gaulle ne saurait se résumer à la légende noire d'un moine-soldat. L'homme est un marin qui a connu l'expérience de la Grande Guerre, un catholique intransigeant, un temps séduit par les thèses de l'Action française, résistant de la première heure, aux avant-postes de la France Libre ; la Seconde Guerre mondiale s'apparente pour lui à une croisade contre le nazisme et Vichy.
Cette biographie, fondée sur des riches archives publiques et privées dont beaucoup sont inédites, est à la croisée de l'histoire navale, religieuse, politique et coloniale. Elle entend retrouver l'unité d'un homme et l'intransigeance d'une vie, sans éluder les interrogations soulevées par ce parcours singulier.
Jeanne d'Arc, patriote et martyre, héroïne féminine au sommet du panthéon national, est une figure centrale de l'histoire de France. Sa mémoire est au coeur d'enjeux politiques dont on sait peu qu'ils ont été mouvants : avant d'être la figure de proue de l'extrême droite, elle a été tour à tour fille du peuple en armes, restauratrice de la monarchie, patriote trahie par son roi et l'Église...
Son histoire et sa mémoire ont été le jeu d'appropriations multiples et antagonistes qui prennent leur source dans ses procès même : condamnée au bûcher comme hérétique et réhabilitée quelques années plus tard afin de légitimer le règne de Charles VII qu'elle a soutenu. Gerd Krumeich retrace, à partir de la Révolution française, les usages de l'histoire de Jeanne d'Arc. Il nous rappelle qu'elle a un temps représenté le parcours d'une simple fille du peuple qui, par son action et ses souffrances, aurait donné naissance au nationalisme français. « Souvenons-nous toujours, Français, que la Patrie chez nous est née du coeur d'une femme, de sa tendresse et de ses larmes, du sang qu'elle a donné pour nous », écrit Michelet. Cependant, d'héroïne de gauche, elle devient, au cours du XIXe siècle, le symbole d'un nationalisme conservateur. Jeanne marque l'impossibilité de trouver un consensus politique qui aurait permis aux « deux France » de se réconcilier. Gerd Krumeich, en analysant les évolutions d'un mythe, fait finalement une histoire du nationalisme français.
« Je suis fait pour combattre le crime, non pour le gouverner », s'exclamait Maximilien Robespierre à la barre de la Convention, la veille de sa chute, le 8 thermidor an II : la formule est caractéristique de sa passion et de son emphase. Elle fait partie de l'abondant florilège qui alimente aussi bien les critiques contre le tribun intolérant que les louanges envers l'homme politique intègre. Tellement intègre d'ailleurs, qu'il finit par agacer le Danton imaginé par Georg Büchner, qui lui lance : « Robespierre, tu es d'une probité révoltante ». Instigateur des horreurs perpétrées sous la Terreur, homme d'État rigide, implacable et déshumanisé pour les uns ; héros et héraut des droits de l'homme, dirigeant incorruptible, bouc émissaire pour les autres (moins nombreux cependant) : admirateurs ou contempteurs, rares sont les indifférents lorsque l'on évoque la figure de Robespierre. La Révolution française a transformé des inconnus en figures de premier plan. Robespierre est l'un de ces anonymes brusquement devenus célèbres. Comment un banal avocat d'Arras, promis à une traditionnelle carrière locale, s'est-il trouvé propulsé en quelques mois à l'avant-scène de l'actualité ? Comment a-t-il pu concentrer sur sa personne une bonne partie du ressentiment contre ce que l'on a appelé la Terreur ? Pour répondre à ces questions, Cécile Obligi a choisi de donner la parole au principal intéressé : Robespierre lui-même. Elle nous fait ainsi découvrir ou redécouvrir un orateur de grande classe et un penseur politique important, que la légende noire a fait trop longtemps oublier.
Rarement un chef militaire aura été tant adulé et simultanément aussi détesté que le duc de Vendôme. Arrière-petit-fils d'Henri IV, ce bâtard princier est un des meilleurs généraux de Louis XIV. Au moment de ses plus grands succès, il passe auprès de ses contemporains et du Roi-Soleil lui-même pour l'égal de Turenne et de Condé, pour un héros digne de son royal trisaïeul. À l'inverse, ses adversaires voient en lui un incapable servi par la chance et Saint-Simon fait de Vendôme une de ses bêtes noires : le mémorialiste a fixé pour la postérité le portrait d'un prince fainéant, vantard, crapuleux et sodomite.
En s'appuyant sur des sources inédites ou revisitées, Fadi El Hage apporte un éclairage nouveau sur ce grand seigneur assoiffé de gloire et de reconnaissance, entre la cour de Versailles et les champs de bataille de l'Europe. Vendôme, héros ou imposteur ?
Fille d'un officier espagnol rallié au Premier Empire, élevée au rang d'impératrice des Français par son mariage avec Napoléon III, Eugénie de Guzman eut une vie étonnante, fastueuse et tragique. Avec Stendhal pour ami, Mérimée pour confident, la reine Victoria pour conseillère, elle fut à la fois une égérie et une régente jalouse de son rôle politique. Sa vie bascula avec la chute du Second Empire, la disparition prématurée des siens et un exil d'un demi-siècle.
Ambitieuse, mondaine, souveraine, mais aussi mère exigeante et femme trompée, l'impératrice, dont on loua la beauté, la grâce ou la générosité, fut aussi jugée superficielle et coquette, autoritaire et réactionnaire. Elle fut habitée jusqu'à l'obsession par le sens de l'honneur, au risque parfois de heurter son entourage et d'égarer son jugement.
D'une plume alerte et élégante, Raphaël Dargent fait le récit de la vie d'Eugénie, interroge son caractère, sa manière d'incarner le pouvoir, son rapport à l'histoire, son action diplomatique, ses goûts artistiques. Tout en se glissant dans la peau de son personnage, il convoque de nombreux témoignages et dresse le portrait haut en couleur de l'impératrice Eugénie.
En 1198, alors que la chrétienté est ébranlée par la chute de Jérusalem et par les appels à une réforme morale et religieuse, les cardinaux élisent un nouveau pape sous le nom d'Innocent III. Issu de la noblesse romaine, théologien de renom et écrivain spirituel, le jeune pontife - il avait trente-sept ans - s'engage aussitôt dans la lutte contre les abus. Il s'attaque aux contestations dans le clergé, aux débordements des princes laïcs contre les prérogatives de l'Église, et lance un nouveau projet de croisade. Mais l'ambitieux pontife est confronté à de multiples résistances et jusque dans la ville de Rome. Esprit religieux peu à l'aise dans les tractations diplomatiques, il doit prendre position dans la guerre civile en Allemagne, contre les rois en France et d'Angleterre et assumer la guerre contre les hérétiques en Languedoc. Dès 1204, la croisade qu'il avait organisée lui échappe et s'empare de Constantinople au lieu de libérer Jérusalem. Pourtant, en quelques années, Innocent III parvient à réaffirmer l'autorité de l'Église romaine, à étendre son influence politique et temporelle et à convoquer le grand concile de Latran IV, qui réforma en profondeur la vie chrétienne. Il laisse à sa mort, en 1216, une papauté redressée, une Église assainie, mais aussi compromise dans les affaires du temps. S'appuyant sur les sources médiévales et sur les fruits de la recherche, cet ouvrage constitue la première synthèse historique en langue française sur ce pape qui marqua l'Europe comme aucun autre au Moyen Âge.
Gambetta est la figure la plus marquante de la IIIe République naissante. Sa popularité ne tient pas seulement à son départ en ballon de Paris assiégé, en octobre 1870. Celui que ses adversaires surnommaient le commis-voyageur de la République, appellation qu'il a assumée avec fierté par égard pour son père, un commerçant, a surtout marqué ses contemporains par ses convictions, exprimées avec force : devant les conservateurs, auxquels il opposait ses « couches nouvelles », les catholiques, qu'il interpellait d'un « le cléricalisme, voilà l'ennemi ! » ou encore les socialistes, auxquels il affirmait : « il n'y a pas une question sociale ».
Au moment où l'Angleterre traverse les deux révolutions de son histoire, la vie de Jacques II (1633-1701) est une succession de crises politiques et personnelles. Enfant, il se réfugie auprès de son cousin Louis XIV pour échapper à Cromwell et s'initie au métier des armes avec Turenne. Après la restauration de son frère Charles II, il mène la reconstruction de la Royal Navy. Malgré les attaques suscitées par sa conversion au catholicisme, il accède au trône en 1685. À l'heure de la révocation de l'édit de Nantes, sa politique de tolérance religieuse est incomprise et lui-même est soupçonné d'absolutisme. Son gendre, le très protestant Guillaume d'Orange, mène la Glorieuse Révolution de 1688, qui le contraint à nouveau à l'exil, malgré la résistance de l'Irlande. Le château de Saint-Germain-en-Laye abrite ses dernières années, dans la dévotion et l'angoisse de la rédemption. À l'inverse de son grand-père Henri IV, Jacques II a choisi son salut plutôt que sa survie politique. Charles II disait pourtant de lui qu'il perdrait son royaume par bigoterie et son âme pour quelques catins : mari infidèle malgré deux mariages d'amour, homme de guerre expérimenté qui perd son honneur en une bataille, chassé de son trône en quelques jours mais suivi en exil par des milliers de fidèles, Jacques II n'est pas d'une seule pièce... Son règne est une des heures de vérité de l'histoire britannique et ses choix personnels résonnent de manière contemporaine : Londres valait-elle une messe ?
Comment Jacques Chirac est-il devenu l'héritier du gaullisme ? Ce personnage atypique et parfois dérangeant avait-il toute légitimité à cette filiation ? Ce livre s'attache à révéler les ressorts d'un débat qui est loin d'être clos. On découvre ici un autre Chirac, moins empressé à s'emparer de l'héritage gaullien qu'on ne l'imaginait. Ainsi se dessine une autre histoire du gaullisme et de la Ve République.
Par les postes qu'ils ont occupés, de l'Académie de France à Rome à la Commune des arts, de Bonaparte à Napoléon, de Louis XVIII à Louis-Philippe, comme à travers leurs réseaux d'amis, d'élèves et de relations, la biographie de Charles Percier (1764-1838) et de Pierre Fontaine (1762-1853) éclaire trois quarts de siècle riches en bouleversements. Les principaux historiens de l'architecture, de Louis Hautecoeur à Sigfried Giedion, s'accordent sur leur influence d'architectes, de professeur, de théoriciens et de « designers » sur la période contemporaine. Pourtant aucun travail de synthèse ne leur a jamais été consacré, à cause de la complexité et de la richesse de leur production, mais aussi de l'énigme d'une association moins fusionnelle qu'il n'y paraît. Ce livre relate les parcours entremêlés de deux amis, liés dès leurs années d'études et qui partagent le même tombeau, mais dont les caractères et les personnalités artistiques étaient pourtant aux antipodes. Il permet de mieux comprendre l'apport de chacun et la répartition des rôles, pour mettre en évidence la cohérence et les contradictions d'une oeuvre qui va de l'architecture au mobilier, du plan de ville au plus délicat ornement.
La destinée de Françoise d'Aubigné, veuve Scarron puis marquise de Maintenon, évoque ces contes de fées où les bergères épousent des rois. Elle constitue sans doute l'exception la plus spectaculaire à la règle des barrières sociales ordinairement énoncée à propos de l'Ancien Régime. Son éducation, son premier mariage, son veuvage, sa rencontre avec Madame de Montespan, ses premiers contacts avec la cour, sa mission auprès des bâtards royaux, l'affaire des Poisons furent autant d'étapes sur le long chemin de l'incroyable ascension qui devait la rapprocher de Louis XIV. Madame de Maintenon est encore aujourd'hui victime d'une légende noire, qui fait d'elle une ambitieuse obsédée par la politique et dont l'esprit de domination aurait porté le roi à une dévotion extrême. En fait, c'est parce que Louis XIV cherchait à mettre de l'ordre dans sa vie affective et amoureuse qu'il épousa Madame de Maintenon. Cette dernière se garda bien d'intervenir dans le déroulement des affaires de l'État, où le roi ne la sollicitait d'ailleurs pas. Pour l'essentiel, ses préoccupations la portèrent vers les tâches d'éducation : après les enfants du roi et de Madame de Montespan, auxquels elle resta attachée toute sa vie, elle s'intéressa aux jeunes filles pauvres de la noblesse, pour lesquelles elle fonda le remarquable établissement de Saint-Cyr.
Louis XV, le roi de la « douceur de vivre », fut adulé, critiqué et surtout incompris. On le crut doux : il était brusque et silencieux. On le dit léger : il était inquiet et grave. On le figura en manteau de lys et en habit brodé, lui qui n'aimait rien tant que la chasse et la vie au grand air. Louis XV fut inconnu à ses propres peuples, un inconnu bien-aimé. Ce sportif timide à la voix rogue et au regard noir fut le souverain du plus grand royaume d'Europe pendant près de soixante ans. Héritier d'un régime ancien et complexe, il réforma sans bouleverser et préféra toujours le consensus à l'affrontement. Un monarque, même absolu, ne peut régner seul : Louis XV conserva ce principe qui allait contre son caractère, mais qui était la condition de l'ordre qu'il a recherché dans toute son action, un ordre de justice et de raison. Tous les jours de sa vie, Louis XV s'appliqua de son mieux à ce dur métier de roi qu'il n'avait pas choisi. À rebours des images que trois siècles d'incompréhension ont forgées, ce portrait historique veut rendre à Louis XV son visage authentique d'affection, de réserve, de dureté, de foi, d'intelligence et de secret.